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bulletin du Fonds Mondial de Solidarité Contre la Faim


(69,8) Mars 2001

COURRIER DE L'UNESCO

   " L'agriculture industrielle privilégie les monocultures spécialisées, l'usage intensif des engrais et la concentration de la propriété foncière. Un peu partout dans le monde, des paysans résistent à ce modèle qui chasse les ruraux de la terre, détruit l'environnement, et empoisonne nos assiettes. Qu'ils soient sans terre au Brésil, agriculteurs bio au Bangladesh ou éleveurs bretons, leurs initiatives dépassent le domaine des techniques agricoles. En s'efforçant de promouvoir l'agriculture familiale, ils défendent l'accès à la terre pour tous, le droit à une alimentation saine et le respect de la nature. "

Ainsi le Courrier de l'UNESCO annonce-t-il la couleur de son numéro de janvier 2001 consacrée à une paysannerie mondiale déboussolée par les effets de la globalisation libérale, mais sécrétant déjà partout de multiples formes de résistance et d'alternatives passionnantes. Tout est bon dans ce numéro du " Courrier " et nous engageons tous ceux d'entre vous qui y ont accès à le lire et à le faire lire. Il est disponible dans les représentations UNESCO de tous les pays, et sans doute auprès de tous les Clubs UNESCO. Achetez-le, empruntez-le, prêtez-le, consultez-le : une mine d'expériences vivantes ! Nous ne résistons pas au plaisir de vous livrer son sommaire :

" Un milliard trois cents millions d'êtres humains travaillent la terre. Mais 500 millions seraient condamnés à disparaître : ils n'ont aucun des moyens nécessaires pour s'engager dans la course à la productivité que leur impose la mondialisation (pp. 20-23). L'"agrobusiness" étouffe ainsi l'agriculture familiale malgré son potentiel de développement durable, décisif pour venir à bout de la faim et des dégâts environnementaux. Au soir de sa vie, le fellah égyptien Iskandar Khalil fait le constat amer mais résigné que ses fils ne pourront pas lui succéder sur la terre de ses ancêtres (pp. 18-19). Mais beaucoup d'autres paysans refusent la fatalité et s'organisent pour bâtir une agriculture alternative. Les sans terre brésiliens arrachent la réforme agraire pour en faire le point de départ de nouvelles relations productives et sociales (pp. 24-26).

En Asie du Sud, où la Révolution verte montre ses limites, des paysans bangladais se lancent avec succès dans l'agriculture biologique (pp. 27-29). Avec des Philippins - et biens d'autres - ils participent à un large mouvement contre les OGM, au nom de leur indépendance vis-à-vis des multinationales et de la défense de l'environnement (pp. 30-31). Sa dégradation et les risques alimentaires croissants conduisent producteurs et consommateurs bretons à s'allier pour des produits sains et des pratiques moins nocives (pp. 32-33). Même en Chine, la plus grande paysannerie du monde est secouée par les tumultes de la libéralisation (pp. 34-35). Enfin (pp. 36-37), M. S. Swaminathan, un environnementaliste indien qui fut l'un des pères de la Révolution verte, crée désormais des "biovillages" autour de Pondichéry parce qu'"un développement sans emploi est un développement sans joie"... "

Et on ne peut pas s'empêcher de faire le rapprochement entre les contestations créatives de la paysannerie et le forum social qui s'est tenu en ce début d'année à Porto Alegre, au Brésil. Des milliers d'ONG du monde entier réunies pour dénoncer et analyser la dégradation planétaire des droits économiques et sociaux des travailleurs sous l'effet des politiques économiques néo-libérales décidées par une oligarchie de l'argent ridiculement rassemblée dans le même temps à Davos en Suisse, sous la protection de centaines de policiers et de militaires à leur solde. Dénoncer, analyser ET proposer.

Oui, une société civile planétaire se met en place, mieux qu'internationale : mondiale. Sans référence préalable aux nationalités des uns et des autres, mais soudée par la résistance à la même oppression, et imaginant dans la solidarité sans frontières les réponses spécifiques à apporter localement au nivellement mortifère voulu par les seigneurs de l'argent.

Nous, on aime.

Alain Cavelier

 


page réalisée par Daniel Durand